« Le personage est un profěte incensé » Fautes en vrac... á la foe! Les échecs du primaire et du secondaire produisent des effets désastreux jusqu'au bout de la scolarité. Et les professeurs ďuniversité sont effarés par les copies de leurs étudiants C e sont des copies prises au hasard. Des commen-taires de texte. Rédigés par des étudiants comme tes autres dans une fac ordinaire. Deuxiěme année de lettres modernes. Dans ľun de ces com-mentaires, il est question de «Profites », dans cet autre, on parle d'un jugement «valabe», et celui-ci évoque des »bis incensées». Tiens ? Sous la plume de cet étudiant, quelqu'un « est exelut» et veut t kre juger». Le narrateur est un «personage». Pourtant, ces textes ont été produits par des bacheliers qui ont passé plus d'un an en fac. Des jeunes censés adorer la littérature. Etre amoureux de la langue francaise. La syntaxe et !e choix des mots réser-vent également leur lot de surprises. «Dans la deuxiěme partie sont develop-pés une digression », écrit un émdiant. Et un autre : «Lapetite vérokest une makdk qui dévisage.» Le narrateur s'est «affligé ä lai-méme une puni-tion». Parfois les étudiants ne font plus la difference entre * h»,«ľa», et * M»OU entre«et»et«est». Comme si les bases grammaticales étaient ré-duites á néant. «C'est la Berezina orthogra-phique!» Le cri du cceur est una-nime. Charges de cours ou profs, jeunes trentenaires ou proches de la retraite, affectés dans des facs pari-siennes ou provinciales, partisans des méthodes anciennes ou modernes, ils font tous le méme constat: au bout de la chaíne scolaire, aprés douze ans de primaire et de secondaire, pour nombre d'étudiants, de graves lacunes n'ont toujours pas été comblées. « En debut ďannée, il n'ya pratiquement pas de copies sans fautes quel que soit le niveau de 1'ěléve», note Christophe Bigot, 31 ans. II en-seigne pourtant á la creme des étudiants. En prépa au lycée Malherbe á Caen. «Le tout-venant, c'est dix ä douze fautes, maisj'ai pu en * En debut ďannée, il n'y a pratiquement pas de copies sans fautes » Christophe Bigot, professeur de lettres á Caen recenser jusqu'ä une ánquantaine dans une copie de licence >, explique Jean-Frangois Guennoc, chargé de cours á París-IV. II n'est pas le seul á avoir fait cette observation. Mémc des étudiants qui rěvent de prendre un jour la plume et de devenir journalistes sont touches. « Voilä pluskurs années que nous awns du instituer une épreuve de dietée au concours ďen-trk », explique Edith Rémond, professeur á ľlJBA, ľlnstitut de Journalisme de Bordeaux-Aquitaine (ex-IUT). La dietée du concours 2006 - ouvert exclusive-ment á des bac+3 - comportait cette phrase : « Devrions-nous accepter leurs oiseaux migrateurs, censé-ment sains ? * Le « censément sains » a eu droit aux orthographes les plus étonnantes de * s'en s'aimant sein t á «sans cémant saints»en passant pas «sans ses mancins», Aux lacunes orthographiques s'ajoutent des difficuStés de vocabu-laire. Professeur á Paris-XIII, universitě de Villetaneuse située en Seine-Saint-Denis, Michel Mathieu-Colas a demandé á ses élěves de premiére année de lettres modernes de déťinir certains mots. Resultats étranges:thomiáae tmeurtre ä domicile »,« xénophobe :qmapeur quand il est enfermé », «autochtone : qui ainie vivrehnuit...»,«sporadique:drogué du sport f. Michel Mathieu-Colas commente : « Ce ne sont pas seule-ment les éléves de Vilktaneuse mais Witte une generation qui se trouve en difficulté avec h langue francaise. » Effectivement. Invités á définir le mot «vade-mecum <>, cet aide-mémoire que ľon garde sur soi pour le consulter, la moitié des quelque 800 candidats journalistes ä ľécole de Bordeaux, tous, done, rappelons-le, titulaires d'une licence, ont ré-pondu : «un dentifrice». Ľadjectif * velléitaire», qui ne se decide pas á agir, a donné lieu ä une kyrielle de definitions:«-mux, dépassé, obsolete, qui pense kre dans son droit, bagarreur, ambt-tieux, courageux, cacocnyme, rancuniere», et beaucoup d'autres... Amüsant ? Pas tant que cela. D'abord, parce que, selon Michel Mathieu-Colas,«nos étudiants sont conscients de kurs difficultés, W 6-12SEPTEMBRE2M7»9