École à la maison, vacances annulées : les parents à l’épreuve Télétravail, cours à distance, promiscuité : ce troisième confinement bouleverse l’agenda des familles et fait resurgir des contraintes et des privations qu’elles croyaient révolues. Agnès Leclair - Le Figaro du vendredi 2 avril 2021, p.4 Le « retour de la galère de l’école à la maison », le « casse-tête de la garde » ou un simple « ajustement de calendrier ». L’annonce d’un troisième confinement a bouleversé l’agenda de milliers de parents. Jeudi, il a fallu s’organiser, revoir ses plans de vacances. « C’est parti pour trois semaines bloquée à Paris dans mon appartement avec mes deux enfants qui courent partout pendant que j’essaie de travailler », lance Marie, cadre parisienne et mère de deux enfants de 6 et 8 ans. Avec un mari qui « travaille non-stop » et un travail difficile à décaler le soir, « je vais jongler », résume-t-elle. « J’imagine que mes enfants vont passer pas mal de temps devant la télé comme lors du premier confinement. C’est difficile de faire autrement avec mon fils autiste qui a beaucoup de mal à s’occuper tout seul », ajoute-t-elle. Ce dernier, scolarisé à l’école du quartier, ne pourra pas bénéficier du maintien de la prise en charge dans les établissements médico-sociaux et médico-éducatifs (IME) accueillant des personnes handicapées, enfants comme adultes, en externat et internat. Virginie, habitante des Hauts-de-Seine, en zone C pour les vacances, s’est rendue compte mercredi qu’elle était « bloquée ». « J’ai annulé mon séjour en Charente-Maritime car mes filles reprennent leur scolarité la semaine où nous avions prévu de partir. » […] Durant sa semaine de congé, elle restera donc sagement à la maison pour veiller à ce que son autre fille, lycéenne, suive bien ses cours en distanciel. « C’est le sacrifice des mères ! J’aurai préféré souffler après des mois difficiles, retrouver la nature, profiter d’un parfum de liberté… », soupire-t-elle. Certains parents, déjà échaudés par les précédents confinements, relativisent l’ampleur de ce chamboule-tout. « Je ne referai pas les mêmes erreurs qu’en mars dernier en essayant de tout gérer de front, quitte à travailler jusqu’à 23 heures. Et, la bonne nouvelle, c’est qu’en primaire, l’école à la maison ne durera que trois jours car lundi est férié et mes enfants n’ont pas classe le mercredi », calcule ainsi Charlotte, mère de deux fillettes. D’autres ont déjà mis « les grands-parents dans la boucle de la réorganisation » ou ressortent des scénarios d’exil à la campagne déjà bien rodés. « Nous avons fait installer internet dans une maison familiale en Vendée durant le deuxième confinement », explique Julien, responsable associatif parisien qui s’apprête à goûter aux joies du télétravail à la campagne. Ses deux enfants, de 11 et 13 ans, pourront passer leurs après-midi dans le parc clos de la propriété plutôt que de rester coincés entre quatre murs. « Avant, nous n’y allions que l’été. La maison était restée dans son jus des années 1950. Nous avons refait la cuisine, changé la literie, débouché les cheminées où nichaient des corneilles, décrit-il. Notre seule crainte, c’est d’avoir froid car il n’y a toujours pas le chauffage. » « Revivre le même enfer » Jeudi matin, à l’entrée des crèches, la tonalité était un peu différente. Les salariés, qui ne peuvent ou ne veulent pas se mettre en arrêt de travail pour garde d’enfant et bénéficier du dispositif d’activité partielle reconduit par le gouvernement « ont peur de revivre le même enfer qu’il y a un an », rapporte Elsa Hervy, déléguée générale de la Fédération des entreprises de crèches. « Le télétravail n’est pas compatible avec la garde des bébés ou des très jeunes enfants. De plus, ces parents ne prennent généralement pas leurs congés durant cette période de vacances scolaires. Pour eux, cela va être long… Ils sont nombreux à nous demander si la fermeture des crèches est irrévocable, poursuit Elsa Hervy. Nous attendons d’avoir la liste des “personnels indispensables” dont les enfants pourront continuer à être pris en charge pour leur répondre. » « Les parents se retrouvent face à beaucoup de difficultés d’organisation à résoudre en très peu de temps », relève pour sa part Gilles Demarquet, président de l’Association de parents du privé catholique sous contrat (Apel). Jeudi, l’Apel a reçu de nombreuses demandes de parents désireux de déplacer leurs dates de vacances pour s’ajuster à ce décalage de calendrier. « Nous avons demandé au gouvernement d’envoyer un signal aux employeurs pour qu’ils fassent preuve de souplesse pour répondre aux demandes des parents salariés qui souhaiteraient modifier leurs congés », indique Gilles Demarquet. Il reconnaît cependant que le choix d’adosser le confinement aux vacances « permet de limiter les conséquences éducatives pour les enfants ».