22 FRANCE LIBERATION LUNDI14 MARS 2011 Des parents ďélěves dénoncent la «discrimination territoriale» Auverlot, inspecteur ďacadémie en Seine-Saint-Denis, a en tout cas une vision plus optimiste du probléme des remplacements. «Enjan-vier, üyaeudes tensions avecjusqu 'ä 15% ďenseignants absents en měme temps ä Epinay, contre 7,5%, la moyennenationale, dit-il. Cecis'ex-plique essentiellement par les épidé -mies saisonniěres. Mais tout est re-devenu normal. De plus, avec 27 remplacants pour 276 classes au total, Epinay est dans la moyenne. Et ä la rentrée, je vais rajouter deux posies. Mais s'ily a des épidémies, ce sera difficile ďéviter les problěmes. Or, peut-on calibrer le remplacement sur quelques semaines dans Van-née ?» Ľ inspecteur pense aussi qu'U y aurait une evolution dans les conges de maternitě, plus longs. Mais d'apres lui, la Seine-Saint-Denis reste «privilegiee» par l'Education ■ nationale, pour compenser ses handicaps sociaux: «C'est le departement oil le seuil ä partir duquel on ouvre une classe est le plus bas [23 élěves] et oü les décharges de cours pour les directeurs sont les plus importantes.» Mais ä la rentrée, il n'échappera pas aux suppressions de postes - 20 dansle premier degré pour 2000 élěves en plus... POLÉMIQUES. Le collectif de parents présentera demain le texte de sa saisine de la Halde, en presence ďune brochette ďélus mais sans les syndicats enseignants, trěs discrets dans cette affaire. La question des absences, est, pour eux, toujours delicate. Iis craignent de voir relan-cer de vieilles polémiques autour des profs qui abusent des conges... Revolte par le remplacement insuffisant des enseignants absents, un collectif d'Epinay (Seine-Saint-Denis) porte ľ affaire devant la Halde. Par VERONIQUE SOULE Photo JEAN-MICHEL SICOT haquejour, on fait le tour des 28 ecoles d'Epinay pour compter les profs absents non sauf urgence, ils bloquent l'acces au telephone, a l'ordinateur... Ils ont aussi organise deux journees de blocage des ecoles spinassiennes. Demain, ils passent a l'etape supe-rieure s ils saisissent la Haute Aufo-rite de lutte contre les remplaces. Depuis sep-tembre 2010, il y a eu ainsi 630 jours de perdus,-avec des classes qui se sont retrouvees sans en-seignant et des enfants qui ont du rentrer chez eux. Si on rapporte ce chiffre au nombre d 'ecoles et de jours travaUles, cela signifie qu'unjoursur quatre, une classe n'apas eu cours faute de remplaqant'.» Membre de la FCPE, la premiere federation de parents d'eleves, Mathieu Glaymann a un fils a l'ecole prirnaire Jean-Jau-res d'Epinay-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis. Avec d'autres parents, depuis deux mois, ils occupent la journee le bureau de la directrice: REPORTAGE discriminations et pour l'egalite (Halde) pour «discrimination territoriale» en mauere d'enseignement. Une premiere dans l'histoire pourtant riche des mobilisations dans l'education. DEFAILLANTE. Le collectif est con-vaincu qu'Epinay n'est pas traité sur un pied ďégalité avec les autres communes d'lle-de-France, hors de Seine-Saint-Denis. Or, plus qu'ailleurs ďaprěs lui, 1'école y joue un role clé, ďintégration et d'as-censeur social. Si elle est dé-faillante, de plus en plus de families qui le peuvent vont fuir vers le přivé ou des communes plus favorisées. «Unjour, a Jean-Jaurés, ily a eu 75 éléves, sur 250, avec des profs absents non remplaces. Et comme beau-coup de parents sont au chômage, on ne se géne pas pour leur demander de reprendre leurs enfants», souligne Mathieu Glaymann. Auparavant, il a vécu dans les Yvelines et les sont auchomap, on nese géne Mathieu Glaymann du collectif de parents Hauts-de-Seine, oil son fils aine etait scolarise: «C'etait un jour d'absencepar-ci, un autreparla, rien de plus.» D'autres parents ont fait leur enquete dans les departements voisins. Avec le meme constat: c'est pire a Epinay. Le collectif sait que la Halde ne pourra pas se prononcer sur le fond. En effet, le territoire ne figure pas parmi les 18 criteres de discrimination retenus par la loi. Mais les parents attendent autre chose: que la Halde fasse des «recommanda-tions», comme la loi l'y autorise, et qu'elle demande une comparaison du remplacement en primaire en Ile-de-France. Iis s'appuient sur le precedent de La Courneuve: en 2009, le maire avait saisi la Halde pour «discrimination territoriale», et dans sa reponse, la Halde avait, en-tre autres, preconise d'etudier les eventuelles discriminations ä l'em-ploi d'habitants de La Courneuve, en raison de leur adresse. «Sur la saisine de la Halde, il m'est impossible de me prononcer» : Daniel jet du ministěre ďassouplir les regies du remplacement - les profs seraient désormais envoyés faire des remplacements dans des departements voisins du leur. Patrick Braouezec, depute de Seine- -Saint-Denis, qui fut instituteur pendant vingt ans á Saint-Denis, sera present demain, aux cótés no-tamment du president socialiste du conseil general, Claude Bartolone, et du maire divers droite d'Epinay, Hervé Chevreau. «Dans le departement, ily a des disaiminations dans de nombreux services publics, expli-que-t-il. Les queues sont intermina-bles á la poste pour des próblěmes de remplacement, et il faut deux mois pour avoir une carte d 'identité. Mais c 'est plus criant dans I 'education, car c'est une discrimination lourde de consequences pour nosjeunes.» Le depute comprend aussi que «des jeunes profs envoyés, nombreux, en Seine-Saint-Denis, avec une formation appauvrie par la reformě, puis -sent craquer». Avant de tirer un coup de chapeau aux «parents d'Epinay quine se résignentpas». m pi m s LAHALDE La Haute Autorite de lutte contre les discriminations et pour l'egalite peut etre saisie par toute personne s'estimant victime de discrimination. Elle mene des enquetes et propose des modifications legislatives. «Oui, vous, parents d'eleves, vous avei le droit ďattendre de ľécole primaire de vos exeeUente.» Nicolas Sarkozy le 15 février 2008 C'est le taux d'eleves de CM2 de Seine-Saint-Denis aux acquis «fragiles» ou «insuffisants» en maths (33% au niveau national en 2010). La Seine-Saint-Denis (1,5 million d'habitants) est le departement le plus jeune de France, avec 29% de moins de 20 ans, et ľun des plus fragiles socialement (17% de chômage, 28% de manages pauvres). Au college, 43,7% des élěves sonjt issus de milieux défavorisés.