Comment l’UE a surmonté la sortie du Royaume-Uni De multiples changements dans les relations au quotidien Du retour des douanes à la fin d’Erasmus outre-Manche, les citoyens et entreprises britanniques comme européens vont devoir s’adapter Cécile Ducourtieux – Le Monde du Dimanche 3 et lundi 4 janvier 2021, p. 2 Le Brexit était juridiquement et politiquement survenu le 31 janvier 2020. Après onze mois de transition, il a eu lieu sans heurt sur le plan pratique et économique jeudi 31 décembre, à 23 heures à Londres (minuit heure de Bruxelles). Bien des choses vont changer pour les entreprises et les citoyens britanniques et européens, alors que le Royaume-Uni a définitivement quitté l’union douanière et le marché unique des Vingt-sept. Les déclarations en douane Pour les exportations britanniques vers l’Union européenne (UE), des déclarations en douane sont désormais obligatoires et systématiques pour toutes les marchandises traversant la Manche, avec contrôles spécifiques pour les animaux et produits phytosanitaires. Cela vaut aussi pour les particuliers : la Poste britannique exige, depuis fin décembre, une déclaration en douane pour chaque colis à expédier sur le continent. Les exportateurs européens sont soumis au même régime de la part des douanes britanniques, mais Londres a décidé de différer au 1^er juillet 2021 l’obligation de déclarations en douane systématiques pour les marchandises entrant sur le territoire national, histoire de se donner un peu plus de temps pour construire les infrastructures de contrôle adéquates. Au 1^er janvier ne seront effectués dans le Kent, au sortir des ferrys et du tunnel sous la Manche, que les contrôles sur les produits dits « sensibles » (armes, ivoire, etc.) et les contrôles antifraude classiques. ~ L’expatriation au Royaume-Uni Les Européens candidats à l’expatriation au Royaume-Uni vont devoir remplir les critères requis par le nouveau régime d’immigration entrant en vigueur ce 1^er janvier dans le pays. Il faudra pouvoir justifier d’une offre d’emploi sur place d’au minimum 25 600 livres sterling par an. Exception notable : les professions scientifiques, les chercheurs et enseignants du supérieur peuvent venir sans offre d’emploi. Les professions médicales, très recherchées par le système hospitalier britannique, bénéficient d’une délivrance de droit de séjour accélérée. Pour tous les nouveaux expatriés après le 1^er janvier, l’accès au système de soins britannique ne sera plus gratuit. Les diplômes ne seront plus reconnus automatiquement. Dans le cadre de l’accord de commerce et de partenariat conclu le 24 décembre avec Bruxelles, des demandes d’équivalences pourront être soumises à l’avenir à une instance conjointe, le UK-EU Partnership Council, mais il faudra s’armer de patience. ~ Les voyages et l’expatriation vers l’UE Les citoyens britanniques perdent le droit de circuler et de vivre librement dans l’UE. Les séjours sur le continent sont limités à quatre-vingt-dix jours sans visa, et les citoyens doivent disposer d’un passeport d’une durée de validité d’au moins six mois au jour de leur départ (pour tous les pays de l’UE, mais aussi pour l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse). Symétriquement, les Européens auront désormais besoin d’un passeport d’une durée de validité au moins aussi longue que leur séjour sur place pour entrer au Royaume-Uni. Si les Britanniques transportent un animal de compagnie, ils doivent avoir établi un certificat de santé animal avant leur départ (il coûte environ 100 livres sterling et prend un mois à établir). Pour des séjours plus longs, ils doivent respecter les lois migratoires de chaque pays. ~ Les études supérieures Les étudiants étrangers souhaitant poursuivre leur scolarité dans une université britannique payaient jusqu’à présent le même niveau de frais de scolarité que les Britanniques (environ 9 000 livres par an). Ils vont désormais devoir débourser parfois jusqu’au double, tout comme les non Européens. Le gouvernement britannique a aussi choisi d’abandonner le programme d’échanges universitaires européen Erasmus +, qui permettait à en moyenne 15 000 étudiants britanniques d’aller passer jusqu’à un an sur un ou plusieurs campus dans l’UE. Un programme alternatif, le programme Turing, est censé être mis en place pour septembre 2021, mais Londres n’a pour l’heure donné aucun détail, hormis sa dotation : 100 millions de livres sterling. ~ La téléphonie, le permis de conduire, l’assurance-maladie… Les Britanniques ne peuvent plus profiter du roaming gratuit quand ils sont en Europe. S’ils disposent d’un forfait téléphonique britannique, ils se verront facturer des frais d’itinérance (pour passer du réseau d’un opérateur à l’autre). La carte d’assurance santé européenne, qui permet de se faire soigner gratuitement ou à coût réduit dans l’UE, ne sera pas non plus renouvelable une fois périmée. En revanche, le permis de conduire britannique devrait suffire pour conduire dans l’UE (même si certains pays peuvent réclamer un permis international). Réciproquement, les permis de conduire européens continueront d’être valides au Royaume-Uni. […]