DOCUMENT X.a.

                              
                              
   Hommages ŕ Guillaume Cliton, comte de Flandre, en 1127
 
 
 
   >>  Le  7 des ides d'avril, un jeudi [jeudi 7 avril],  des
hommages furent de nouveau rendus au comte [...]. En premier
lieu, ils firent les hommages de la façon suivante. Le comte
demanda  [au  futur vassal] s'il voulait devenir  son  homme
sans  réserve, et celui-ci répondit : " Je le veux " ; puis,
ses  mains  étant  jointes dans celles  du  comte,  qui  les
étreignit,  ils s'alličrent par un baiser. En  second  lieu,
celui qui avait fait hommage engagea sa foi en ces termes  :
"  Je  promets  en  ma foi d'ętre fidčle, ŕ  partir  de  cet
instant, au comte Guillaume et de lui garder contre tous  et
entičrement  mon hommage, de bonne foi et sans tromperie.  "
En troisičme lieu, il jura cela sur les reliques des saints.
Ensuite, avec la verge qu'il tenait ŕ la main, le comte leur
donna  les  investitures, ŕ eux tous qui, par ce pacte,  lui
avaient  promis sűreté, fait hommage et en męme temps  pręté
serment. <<
   
   Galbert de Bruges, Histoire du meurtre de Charles le Bon,
        comte de Flandre, éd. H. Pirenne, Paris, 1891, p. 89
                                        (trad. R. Boutruche,
      Seigneurie et Féodalité, Paris, Aubier, 1959, t. I, p.
                                                       335).
   
   Ce  texte provient de /'Histoire du meurtre de Charles le
Bon,  par  Galbert de Bruges. Le 2 mars 1127,  le  comte  de
Flandre  Charles le Bon était assassiné ŕ Bruges. Scandalisé
par  ce  meurtre, un clerc de la ville, déjŕ âgé, entreprend
sur-le-champ   de  raconter  les  événements   qui,   depuis
l'avčnement  de  Charles le Bon en 1119, ont  conduit  ŕ  sa
mort. Galbert reprend la plume l'année suivante pour décrire
les  problčmes de succession qui se déroulčrent  en  Flandre
jusqu'en   juillet   1128.  Récit  d'un   témoin   oculaire,
/'Histoire  du  meurtre de Charles le Bon  n'a  pourtant  eu
qu'une  trčs  faible diffusion au Moyen Age et ne  nous  est
parvenue  que  par  des  copies  dont  les  plus  anciennes,
conservées  ŕ  Arras et ŕ Paris, datent du 1er sičcle.  Trčs
utilisé par les historiens, ce texte relate la cérémonie des
hommages  rendus au successeur de Charles le Bon,  Guillaume
Cliton, suivant un rituel qui a valeur d'exempte. Le  vassal
fait  d'abord hommage par la parole et le geste ; il  engage
ensuite  sa  foi  en prononçant un serment de  fidélité.  En
retour,  le  seigneur  procčde, par  la  remise  d'un  objet
symbolique - ici la verge -, ŕ /'investiture du fief concédé
au vassal.
 Le  document parle de lui-męme, comme témoin des  violences
exercées par les seigneurs sur l'ensemble de la société.  Il
montre  ŕ la fois l'effort tenté par l'Église, avec  l'appui
du roi, pour imposer des limites ŕ la violence, et la faible
portée  pratique  de  cet effort, en raison  des  nombreuses
clauses restrictives qui sont prévues.