Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire L 'enseignement en France, grandes lignes 1 - Historique Époque gallo-romaine : 3 cycles : 7-12 ans : sous la direction du maitre ďécole (magister ludi), on apprend á lire et á compter; 12-15 ans : auprěs du grammairien (grammaticus), etude de la langue, explication de textes en prose (oeuvres de Cicéron et Salluste) et poétiques (Horace, Virgile, Ovide); enseignement supérieur : art oratoire enseigné par le rhéteur. Les campagnes n'ont pas ďécoles et la population est illettrée. Dans les families riches, précepteurs. Universités célěbres : Autun, Marseille et Bordeaux. Moyen Age : Ľan 789 marque le debut de la renaissance carolingienne : Charlemagne (742-814), empereur d'Occident (800-814) institue un réseau ďécoles surtout destinées aux futurs prétres et fonctionnaires ; ľ enseignement y est gratuit. En 1257, le theologien Robert de Sorbon (1201-1274), chapelain de Louis IX (canonise Saint Louis en 1297), lui-méme tenant son nom de son village (dans les Ardennes) fonde le college de la Sorbonne, une école de theologie á ľintention des écoliers pauvres, et dont les bätiments seront donnés á ľUniversité en 1808. XVIe et XVIIe s. : Essor de ľécole urbaine et rurale. Les Jésuites, les Compagnons de Jésus, intensifient et adaptent ľenseignement qui s'améliore: le nombre d'éléves ne cesse d'augmenter. Creation ďécoles religieuses tenues par des eures, de colleges tenus par des congregations. Depuis ľEdit de Nantes (1598) et jusqu'á sa revocation (1685), les Protestants ont des établissements scolaires et universitaires qui échappent au contrôle de l'Eglise. XVnie s : 1791 Lois supprimant les congregations : les enseignants sont autorisés á faire la classe á titre personnel (en touchant une pension de l'État). 1792-1793 Grandes lignes des 3 degrés (primaire, secondaire, supérieur) ; décrets Lakanal (1762-1845) : «ľenseignement est libre ... tout citoyen a le droit ďouvrir une école et ďenseigner ... muni ďun certificat de civisme et de bonnes mceurs. » Jusqu'au XJXe s. alphabétisation au nord d'une ligne Saint-Malo-Genéve (en Normandie, 80 á 90 % des hommes, 75 % des femmes savent écrire leur nom) ; au sud, la majorite ne sait ni lire ni écrire. XIXe siěcle : 1802-1808 Ľempereur Napoleon crée les lycées, le baccalauréat et ľUniversité imperiale. La France est divisée en academies. Le primaire reste aux mains de l'Eglise, le secondaire et le supérieur passent sous le contrôle de l'Etat. Des colleges secondaires prives existent á côté des lycées d'Etat. 1816, loi obligeant les communes á pourvoir á ľenseignement primaire. 1833 La loi Guizot fait obligation aux communes ďouvrir une école primaire de garcons ; une école normale ďinstituteurs est mise en place dans touš les départements. 1850 la loi Falloux affirme la liberté de ľenseignement et oblige les communes de 800 hab. et plus á entretenir une école primaire de filles ; l'Eglise a encore un droit de regard. 1867 Victor Duruy (1811-1894) crée des cours publics pour jeunes filles. 1875, liberté étendue á ľenseignement 1 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire sup. Děs 1877, les républicains combattent l'Eglise et ľéducation religieuse. 1879 loi obligeant les départements á entretenir une école normale d'institutrices. 1880 Loi Camille See (1847-1919) organisant ľenseignement secondaire feminin. 1881-1882 Loi Jules Ferry (1832-1893), alors ministře de l'Instruction publique de la Ulě République : instruction primaire obligatoire de 7 á 13 ans, école publique laique et gratuite ; l'instruction morale et civique remplace ľenseignement religieux (la religion pourra étre enseignée le jeudi, mais en dehors de ľécole). Celui-ci reste un droit des élěves et des families, á condition qu'il soit organise en dehors des heures de classe et des edifices scolaires. 1886 Laicisation du personnel enseignant dans les écoles laiques (laicisation achevée en 1897 ; encore 7.000 religieuses dans les écoles publiques en 1901); reorganisation de ľenseignement primaire. 1889 Les instituteurs deviennent des fonctionnaires d'Etat. XXe siěcle : 1905, Separation de l'Eglise et de l'Etat. 1912 Les ecclésiastiques sont exclus de ľenseignement public. 1924, Ľenseignement secondaire devient mixte. 1930, Gratuité en 6ě (étendue á tout le secondaire en 1930-32); ouvertuře du Ier jardin ďenfants á Paris, place du Cardinal-Amette. 1931, La Chambre des Deputes vote á ľunanimité la gratuité de ľenseignement secondaire public (classe de 5ě), « sous reserve du maintien de la Uberte de l'enseign. qui est l'une des lois fondamentales de la République ». 1936, Reorganisation du 1er degré pour que les plus doués puissent passer dans le 2e degré, puis le supérieur ; prolongation de la scolarité de 1 an. Constitution de 1946 et 1958 : «La nation garantit ľégal accěs de l'enfant á ľadulte á l'instruction, la formation professionnelle et á la culture ». 1951 Loi Deixonne sur ľenseignement des langues regionales (alsacien, breton, Catalan et corse); loi créant une allocation scolaire pour les families quelle que soit ľécole choisie. 1956, Suppression de ľexamen ďentrée en 6e et des devoirs á la maison pour le primaire. 1959, scolarité obligatoire jusqu'á 16 ans. 1966 : ouvertuře des IUT (Institut universitaire de technologie) et Organisation de la lere année du 1er cycle universitaire. Nov. 1968 Plus de 80 universités (dont 13 en region parisienne) regroupent en leur sein 800 UFR (unites de formation et de recherche), cellules de base des universités. Une UFR est gérée par des représentants des enseignants, chercheurs, érudiants, membres du personnel non enseignant et éventuellement de personnalités extérieures 1973, Creation du DEUG (diplome ďétudes universitaires generates), professionalisation de certaines filiěres ds le cycle supérieur. 1985, Creation du Bac pro. 1995, « Le Nouveau contrat pour ľécole » recentre les programmes du primaire sur la maitrise de la langue et une renovation du baccalauréat. XXIe siěcle : Juillet 2003, Le ministře de ľEducation lance ľidée d'un débat national sur ľécole. Mars 2004 : grand débat national sur ľécole dont ľobjectif est de recentrer sur les savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter). 2 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire 2 - Grands principes Liberie de l'enseignement: coexistence d'un systéme public et přivé pouvant bénéficier de ľaide de ľEtat et soumis á un contrôle. Pour ouvrir une école primaire, il suffit d'etre étre francais, majeur, titulaire d'un diplome de fin ď etudes secondaires, en faire une declaration au maire de la commune (loi de 1886); pour ouvrir un établíssement secondaire : étre bachelier et licencie, adresser la declaration á ľinspecteur d'Académie; supérieur : declaration de 3 futurs administrateurs de ľétablissement á adresser au recteur ou á ľinspecteur de l'Académie. Tout citoyen ägé de 25 ans ou toute association peut ouvrir un cours d'enseignement sup. Instruction obligatoire de 6 á 16 ans : les parents qui le souhaitent peuvent faire donner á leur enfant un enseignement par des professeurs particuliers, contrôle par le maire et la commission municipale scolaire. La'ícité : enseignement public neutře en matiěre de religion, philosophie et politique (loi de 1882, reprise ds les Constitutions de 1946 et 1958). Les personnels pédagogiques sont laiques (loi de 1882,1886,1912); une journée de congé est octroyée ds les écoles primaires publiques pour que les enfants puissent suivre une instruction religieuse si les parents le souhaitent (loi de 1882). Interdiction ďarborer des insignes ďappartenance religieuse (1989) mais rěglement intérieur de college interdisant le port de tels objets considéré comme illegal (1992). En nov 1994, un médiateur de 1'Education national est chargé de résoudre les affaires de port de foulard (400 cas de 1994 á 1998). Exception : les départements du Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle, annexes par l'Allemagne de 1871 á 1918, ont garde le statut scolaire de la loi Falloux (1850): enseignement religieux (2h/semaine) fait partie de l'horaire normal, donne par des instituteurs volontaires et dont les enfants peuvent se faire dispenser á la demande de leurs parents. 4 confessions reconnues : Eglise catholique, Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine (calviniste), Eglise de la confession d'Augsbourg (luthérienne), confession israélite. D'aprés un sondage CSA pour Le Monde et Notre Histoire (juin 2000) : 57% sont pour un enseignement de l'histoire des religions, 55% contre la distribution de menus spéciaux á la cantine en fonction des confessions, 72% contre les dispenses de cours les jours de fétes religieuses (vendredi et samedi). Gratuité : totale pour le primaire ; partielle dans le secondaire (sauf livres) et le supérieur (droits ď inscription). Role de l'Etat: Contrôle le fonctionnement des établissements prives ; garantit ľégalité ďaccés á l'instruction pour touš les enfants, ainsi que leur accěs aux examens publics ; définit les programmes nationaux d'enseignement et met en oeuvre la politique educative; prend en charge le recrutement, la formation et la remuneration des enseignants dont la plupart sont des fonctionnaires formes dans des IUFM (instiruts universitaires de formation des maitres) mis en place en 1991 qui accueillent aussi bien les candidats á l'enseignement du Ier degré (professeurs des écoles) qu'á l'enseignement du 2nd degré (certifies et agrégés) : pour chacun, 5 années ďétudes au-delá du baccalauréat. Touš les diplômes sont nationaux, délivrés par l'Etat: le 1 er, le baccalauréat, permet le 3 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire passage dans ľenseignement supérieur. Ľenseignement public relěve de ľautorité directe du ministře de l'Education nationale saufen ce qui concerne ľenseignement agricole (ministěre de ľ Agriculture); activités relevant de ľéducation populaire, des sports, des loisirs, de la jeunesse (Ministěre de la Jeunesse et des Sports); établissements specialises et grandes écoles (divers ministěres : Defense, Justice, Industrie, etc.). En 2005, la part des dépenses ďéducation représente 7,1% du PIB, soit 1900 € par habitant ou 6800€ par élěve ou étudiant. 3 - Organisation Dans le 1er degré, les écoles primaires (appelées aussi élémentaires) accueillent les élěves durant les 5 années allant du cours préparatoire (CP) au cours moyen 2eme année (CM2). Depuis les années 70, trěs fort développement de ľenseignement préscolaire : la totalite des enfants de 3 á 5 ans fréquentent les classes maternelles. Ľenseignement secondaire (le 2n degré) comprend 2 cycles successifs : de 11 á 15 ans, presque tous les enfants suivent 4 années de formation (6eme_3eme)5 ^ans un collěge devenu unique depuis 1975. A ľ issue de la 3eme, orientation en lycée (classes de 2n e, lere, Terminale) vers ľune des 3 grandes filiěres du 2nd cycle (enseignement general, technologique ou professionnel) qui préparent aux baccalauréats correspondants ou á des diplômes intermédiaires (notamment Certificat d'Aptitude Professionnelle - C.A.P. - ou Brevet d'Aptitude Professionnelle - B.E.P.) et que les candidats présentent« normalement» á ľäge de 18 ans. Les orientations (redoublement, passage ds la classe supérieure, changement de filiěre) se font par une procedure qui instaure, dans chaque établissement, un dialogue entre, d'une part, Institution scolaire (enseignants, administration) et, d'autre part, les families et les élěves. Si les enseignants rendent leur avis en conseil de classe, les parents ďélěves peuvent faire appel d'une decision qui ne leur convient pas et exiger, selon le niveau d'études, un passage plutôt qu'un redoublement ou un redoublement plutôt qu'un passage dans une filiěre non désirée. Dans chaque établissement, un corps specialise de conseillers d'orientation aide les élěves, les parents et les enseignants á résoudre les problěmes rencontres. La trěs grande majorite des élěves est accueillie dans des établissements places sous la tuteile du ministěre de l'Education nationale. Toutefois, ceux qui souffrent de handicaps divers fréquentent des établissements médico-sociaux du ministěre de la Santé, d'autres des établissements agricoles (formations techniques et professionnelles). Enfin, d'autres, ägés d'au moins 16 ans, suivent des formations en apprentissage (contrat de travail), qui préparent á tous les types de diplômes professionnels. Les établissements places sous la tuteile du ministěre de l'Education nationale peuvent étre publics ou privés. Contrairement aux pays anglo-saxons, la part de ľenseignement přivé reste faible, regroupant environ 15 % des élěves dans le 1er degré et 20 % dans le 2n degré, proportions restées stables depuis les années 90. L'essentiel de ľenseignement privé est constitué d'établissements catholiques sous contrat d'association avec l'État (qui rémuněre notamment leurs personnels). Le privé hors contrat rassemble moins de 50.000 élěves et repose sur une forte participation financiere des families. 4 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire Dans ľenseignement supérieur coexistent différentes formations dont la finalité, les conditions d'admission et ľorganisation sont trěs variées. II existe également un certain nombre de « passerelles » entre elles, permettant ainsi á un érudiant une nouvelle orientation. Etudes technologiques en I.U.T. qui durent 2 ans, sanctionnées par un diplome universitaire de technologie (D.U.T.), trěs prisées car il en existe peu; alternent enseignement théorique et pratique (stage en entreprise) Etudes universitaires generates, simplifiées depuis le processus de Bologne (2005) ďharmonisation des études á un niveau européen, comprenant 3 cycles : Ier cycle de 3 ans sanctionnée par une licence ; 2eme cycle de 2 ans donnant lieu á ľobtention d'un master; 3eme cycle de 3 ans de haute specialisation et de formation á la recherche, sanctionné par un doctorat. A chaque cycle correspond un certain nombre de credits ECTS (European Credits Transfer System), un systéme de validation initié en 1989 dans ľesprit ďharmoniser les acquis pour faciliter la mobilite des étudiants entre les universités (programmes ďéchanges Erasmus). Etudes universitaires conduisant aux professions de santé : médecine, pharmacie, vétérinaire, Odontologie (profession dentaire) Grandes écoles : Haute Etudes Commerciales (HEC), Institut d'Etudes Politiques (Science Po), Centrale, Ecole des Mines, Ecole Supérieure ďélectricité (Supelec), Polytechnique, Ecole Nationale ď Administration (ENA), etc.: entrée sur concours, formation de trěs haut niveau qui dure entre 3 et 5 ans. Ecoles ďingénieur (sciences appliquées, commerce, etc.) II existe également une universitě du 3eme äge (la 1er6 fut fondée á Toulouse en 1973) : activités culturelles, physiques et artisanales (yoga, gymnastique, histoire regionale, langues étrangěres, économie, politique, reliure, dessin, voyages), et un dispositif de formation permanente pris en charge par différents ministěres ( Postes et Telecommunications, Armées, Agriculture, Education nationale); depuis la loi de 1971, tout salarié a droit á un congé individuel de formation dont le financement est assure par des organismes agrees par ľ Etat et ľemployeur. Le CNAM (Conservatoire national des arts et metiers), le CNED (le centre national d'enseignement á distance, fonde en 1939, rattaché au ministěre de l'Education nationale) sont 2 importants organismes d'enseignement postscolaire et postuniversitaire. 4 - Tendances & evolutions Durant les années 1960, la generalisation de 1'accěs des élěves á ľenseignement secondaire va provoquer une veritable explosion des effectifs en college. En 1985, ľannonce de l'objectif d'amener 80% des jeunes au niveau du baccalauréat ďici á ľan 2000 a provoqué une autre secousse. En 2004, bien que cet objectif ne soit pas atteint, ce sont environ 62% des jeunes qui atteignent le niveau du baccalauréat soit dans des établissements de ľ education nationale, soit dans des lycées agri coles, soit sous statut d'apprenti. Certe proportion a quasiment double en l'espace de 15 ans, la proportion des 5 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire jeunes ayant quitté le systéme éducatif sans avoir obtenu de diplome étantpassée ďenviron 30% durant les années 1960 á 6% en 2004. Cest pourquoi la mise en place, dans les années 1990, ďépreuves nationales ďévaluation des acquis scolaires, en fŕancais et mathématiques pour tous les enfants de CE2 (8 ans) et 6eme (11 ans), vise á repérer les enfants en échec scolaire. Des réseaux ďaide specialises aux éléves en difficulté (RASED) les prennent en charge. Deux heures hebdomadaires ďencadrement individualisées ou de remise á niveau font également partie des programmes, quel que soit ľétablissement scolaire, école primaire, college ou lycée. De merne ľenseignement modulaire et les travaux personnels encadrés, mis en oeuvre á la rentrée 2000 dans les series generates de classes de 1er6, visent á développer ľapprentissage de ľautonomie. En 2003, les résultats aux tests pratiques lors de la Journée ďappel et de preparation á la Defense ont en effet révélé que 4,9% des jeunes ägés de 17 ans éprouvent de graves difficultés en lecture dont 5,9% en region Rhône-Alpes-Côte d'Azur, le poids des situations d'illettrisme étant inégalement réparti sur le territoire national. 5 - Ľécole maternelle, son histoire, son role, ses objectifs "Former les esprits sans les conformer, les envahir sans les endoctriner." (Jean Rostand) Ľécole maternelle a une singuliére histoire : née d'initiatives individuelles suscitées par ľémoi de voir négligée ľéducation de tant d'enfants, le pasteur Oberlin crée la premiére école « á tricoter » dans les Vosges. Les institutrices s'appellent alors « conductrices de la tendre enfance ». En 1801, á ľinitiative de Madame de Pastouret, est créée une salle « ďhospitalité ». D'autres tentatives existent et notamment en Angleterre avec les «infants shoot». Nourrie de leur experience, la France, dans une circulaire de Thiers en 1883, impulse la creation d'établissement de ce type que l'on appelle désormais « salle d'asile ». En 1855 par décret, les salles d'asile deviennent des établissements d'enseignement pour les jeunes enfants et préfigurent ľécole maternelle actuelle. A cette époque, les effectifs sont trěs importants : une centaine d'enfants sur des gradins, dans une salle unique avec trěs peu de materiel. Se pose alors le probléme de la formation du personnel des salles d'asile. Marie Pape Carpentier (1815-1878), directrice d'une salle d'asile, va jouer un role décisif dans Involution des concepts éducatifs en formant notamment les futures directrices. Le terme « Ecole maternelle » lui est dů. Lazare Carnot l'utilise dans un arrété en 1848 mais il n'aura réellement de vie qu'avec le décret du 2 aoůt 1881. Ainsi naissait ľécole maternelle et les classes enfantines passant d'une volonte d'assistance sociale á une reelle politique d'éducation. Parallělement á cette approche "charitable et institutionelle", une deuxiéme approche va nourrir Involution de ľécole matemelle avec les apports de la biologie, de la psychologie et de la sociologie. Le docteur Maria Montessori (1919) porte une attention particuliěre á l'enfant avec du materiel á la taille de l'enfant avec la creation de jeux sensoriels. 6 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire Pauline Kergomard (1835-1925) succěde á Marie Pape Carpentier et va hitter contre le dressage. «Ilfautque I'enfant dans ľécole soitdéjá une personne et non un numero ». Ľintroduction du jeu comme méthode apparaít. « Le jeu, c'est le metier de ľenfant, sa vie, la forme materielle de son activité». Germaine Tortel (1896-1975) complete cet itinéraire : «La pédagogie est une attente du miracle enfantin, une attente aux moments fertiles. Elle est ľart de lui donner le temps de s 'accomplir ». Ľécole maternelle francaise est unique, eu égard au systéme éducatif européen, c'est une école á part entiěre avec des enseignants formes qui suivent des objectifs pédagogiques. Sa qualité est unanimement reconnue et enviée par de nombreux pays. Elle a un role complémentaire de celui du milieu familial. C'est un lieu d'éveil qui participe au développement des possibilités de ľenfant et á la formation de sa personnalité. Elle prepare aux futurs apprentissages par la pratique ďactivités (motrices, artistiques, corporelles, langagiěres, scientifiques...) Ces activités suscitent la curiosité des enfants et ainsi augmentent leurs connaissances, tout en laissant une place á leur imaginaire; elles tiennent compte des besoins et des rythmes particuliers de chaque enfant. En maternelle, les enfants font de vraies acquisitions, qui passent par le plaisir et le jeu, principales motivations de I'enfant en situation d'apprentissage. Ľécole est aussi un lieu de socialisation ou I'enfant établit des relations avec les autres - enfants ou adultes - en apprenant les regies sociales nécessaires á la vie de groupe. II s'apercoit qu'il peut coopérer avec eux pour créer, experimenter, faire des projets. Par la presence d'enfants d'origines diverses, chacun découvre et apprend á connaitre d'autres cultures. Certains syndicats d'enseignants revendiquent ľentrée dans le systéme éducatif des enfants de moins de trois ans, si la famille le demande. Cette revendication trouve sa justification dans le fait qu'aujourd'hui ľexpérience prouve que plus I'enfant entre jeune dans le systéme éducatif, meilleures sont ses chances de réussite. 6 - Une autre facon d'enseigner : Celestín Freinet (1896 - 1966) Freinet nařt á Gars (Alpes-Maritimes) en 1896. Aprěs des etudes primaires á ľécole du village, il part en pension á Grasse en octobre 1909 en vue d'y preparer le brevet élémentaire. En 1912, il entre á l'Ecole normale d'instituteurs de Nice, ou il va poursuivre ses etudes jusqu'á la fin de la deuxiěme année... á cause de la declaration, en aout 1914, de la Premiere Guerre mondiale. Le 15 avril 1915, Freinet est mobilise, aprěs avoir obtenu en mars le certificat de fin ď etudes normales. Le 23 oct 1917, il recoit une balle, au poumon droit, pres de Soissons. Trěs griěvement blessé, il commence une longue convalescence durant laquelle il va érudier, pour preparer un professorat de lettres, Rabelais, Montaigne, Rousseau et Pestalozzi (pedagogue Suisse 1746-1827, promoteur de ľéducation populaire) tout en se tenant au courant des recherches et des experiences contemporaines en matiěre ď education nouvelle. Le Ier Janvier 1920, Freinet est nommé mařtre-adjoint á la petite école de Bar-sur-Loup (Alpes-Maritimes). Dans quelles conditions va-t-il done exercer son metier ? « Quandje suis revenu de la Grande Guerre, en 1920, je n 'étais qu 'un «glorieux blessé » du poumon, affaibli, essoufflé, 7 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire incapable de parier en classe plus de quelques minutes (...). Comme le noyé qui ne veutpas sombrer, il fallait bien que je trouve un moyen pour surnager (...). Sij'avais eu, comme tant de mes collegues, le souffle suffisamment solide pour dominer de la voix et du geste la passivité de mes élěves, je me serais persuade que ma technique restait malgré tout acceptable. J'aurais continue á user de ma salive, n° 1 de ce que nous appelons l 'école traditionnelle, en consequence de quoi j 'aurais, trěs tôt, fini mes experiences. » Freinet prend done vite conscience de ses impuissances á la fois physiques et professionnelles. Or, il aime passionnément son metier, et veut l'honorer. A l'origine de ses recherches, il y a done la nécessité dans laquelle il s'est trouvé ďaméliorer, pour des raisons de santé, les conditions de son travail d'instiruteur, mais aussi son désir de changer son metier pour mieux l'exercer. Ainsi, aprěs avoir étudié Rabelais, Montaigne, Rousseau, Freinet lit les travaux des célěbres pedagogues Claparěde, Dewey, Fernere, Decroly, Montessori, etc. Pour en savoir plus sur les pedagogies nouvelles, il entreprend, děs le mois d'aout 1922, un voyage ďétudes á Hambourg oú il visitě des écoles communautaires pratiquant la pédagogie du « mařtre-camarade ». En aoůt 1923, il participe á ľun des premiers congrěs de la Ligue internationale pour ľéducation nouvelle á Montreux, oú il rencontre touš les grands mařtres de ľéducation nouvelle de ľépoque. Mais, dit-il, « quandje retournai seul dans ma classe, en octobre 1923, sans soutien et sans appui moral des penseurs que j'admirais, je me sentais désespéré : aucune des theories lues et entendues ne pouvait ětre transportée dans mon école de village. Les seules realisations valables étaient celieš de certaines écoles nouvelles d'Allemagne ou de Suisse qui, avec un nombre réduit ďéléves et une profusion ďéducateurs de choix, fonctionnaient dans des conditions qui n 'avaient rien de comparable á celieš que je devais subir. » Constatant un décalage entre la théorie et la pratique, il inaugure la classe-promenade qui lui permet de s'échapper de ľair confine de la classe et de travailler autrement. « La classe-promenade fut pour moi la planche de salut. Au Heu de somnoler devant un tableau de lecture, á la rentrée de la classe de ľaprés-midi, nous partions dans les champs qui bordaient le village (...). Nous observions la Campagne aux diverses Saisons (...). Nous examinions plus scolairement autour de nous la fleur ou l'insecte, la pierre ou le ruisseau (...). Et nous ramenions nos richesses : des fossiles, des chatons de noisetiers, de l'argile ou un oiseau mort (...). Quand nous retournions en classe, nous éerivions au tableau le compte rendu de la "promenade ". » « Si je pouvais, se dit-il alors, par un materiel d'imprimerie adapté á ma classe, traduire le texte vivant, expression de la "promenade", en page scolaire remplagant les pages du manuel, nous retrouverions, pour la lecture imprimée, le merne intérét profond et fonctionnel que pour la preparation du texte lui-méme. » Ce réve ne tardera pas á devenir realite : Freinet trouve un jour « chez un vieil artisan imprimeur, un petit materiel d'imprimerie avec composteurs spéciaux et presse de bois. » En octobre 1924, il introduit ľimprimerie dans sa classe. 8 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire 7—Récapitulatif (critique) de ľhistoire de ľ education en France, inspire d'un ouvrage de Jacques Salome Modele Jules Ferry : « La lecture et ľécriture sont les fondements de la liberté individuelle et de ľégalité de chacun. Nous affirmons que l'esprit scientifique doit rester ouvert á la critique de la pensée. Cest la grande base de notre démocratie! » (fin XIXe siěcle) Modele 1914 : « La discipline, le sport, ľinstruction civique sont les fondements de ľenseignement républicain ! » Modele Aprěs guerre : « II faut apprendre ľhistoire des autres nations afin que rěgne la paix dans le monde ». Modele 1925 : « La liberté de chacun doit étre limitée á la liberté des autres.. » Modele Entre deux Guerres : « II faut cultiver le doute ! II ne faut pas se laisser piéger par de belles idées. Sachons étre sceptique ! Le scepticisme est la matiěre fundamentale á apprendre. Et au travers de toutes les autres matiěres... » Modele Occupation : « Les valeurs traditionnelles de notre nation francaise s'expriment dans la devise « Travail, Familie, Patrie ». Chantons ľhymne au Maréchal... » Modele de la Liberation : « Good morning boys ! Today nous allons étudier le plan Marschall. Demain, vous aurez un cours ďanglais. Vous étes OK ? » Modele 1968 : « Qu'est-ce que vous avez envie de faire aujourďhui ? Aprěs le vote determinant les deux grands courants presents dans notre groupe-classe, je propose que les leaders naturels qui se dégageront ici animent ľactivité de facon non directive... » Modele Mathématiques Modernes : « Un paysan échange un ensemble P de pommes contre un ensemble M de pieces de monnaies. Le cardinal de ľensemble M est égal á 100 et chaque element PM vaut 1 franc. Dessinez 100 gros points representant les elements de ľensemble M » Modele 1970 : « La matiěre n'est pas essentielle, la discipline est secondaire. II faut apprendre á apprendre... » Modele 1980 : « II faut motiver les élěves des classes difficiles, il faut mettre en oeuvre une pédagogie par objectif, des caméscopes et des ordinateurs... Ca va leur plaire ! » Modele 1990 : « Les grandes matiěres scolaires comme ľéducation sexuelle, le sida, les drogues, le racket seront dorénavant traitées á travers ľhistoire, la géographie, le calcul, le francais et ľéducation civique. II convient de prôner ľinterdisciplinarité, de décloisonner touš les savoirs et les cours ! » 9 Culture & civilisation frangaises - Beatrice Vicaire Modele 2010 : « Ľancétre du professeur general, autrefois appelé « instit», a disparu des programmes avec la transformation des écoles en éco-musée. L'ordinateur, present dans toutes les chambres des enfants děs cinq ans, a pris le relais. Internet dispense des cours de 5 ans á 25 ans. Les élěves surfent pendant 20 ans sur le web afin de décrocher des unites de scolarité á distance. Les résultats sont enregistrés dans les cartes «Vital Savoir» qui remplacent les Curriculum Vitae. La formation professionnelle se fait essentiellement par le multimédia et le tutorat. Les profs ont été reconvertis en technicien de maintenance informatique, les agrégés en concepteur multimédia, les recalcitrants en technicien de surface chez Microsoft University. Les seuls cours magistraux qui demeurent sont au College de France dont les résultats financiers seront côtés en Bourse trěs prochainement (les auditeurs le propulsent au 2e rang mondial aprěs Haward, Oxford est en chute libre). Les élěves qui n'arrivent pas á manier la souris informatique sont parqués dans des reserves confiées á la Compagnie Disney. » Sites et ouvrages de reference : www, education, fr www.insee.fr www, illettrisme. org http://freinet.org/pef/charte.htm Evelyne Charmeux, Celestín Freinet ou la méthode naturelle de lecture, Magazine Toboggan, Bayard Presse, Paris, 1991 Jacques Salome, Charte de vie relationnelle á ľécole, Albin Michel, Paris, 1995 Luc Bruliard, Gerald Schlemminger, Le mouvement Freinet: des origines aux années quatre-vingt, L'Harmattan, Paris, 1996 La République des professeurs, L 'Histoire n°268, septembre 2002 Gerard Mermert, Francoscopie, Larousse, Paris, 2007 10