72 Marila Mallet phone public pour appeler Amelia. Je n'ai pas pu parlor avant plusicurs minutes tellement j'avais envie de rire. A l'autre bout de la ligne, Amelia rep6tait avec un filet de voix apeuree: 5 - Qu'est-ce qu'il y a? Qu'est-ce qu'il y a? J'ai finalement contenu mon rire: - J'ai trouve la maladie de Pepito! Sa langue mater-nelle, ce n'est pas l'espagnol, ni le frangais, ni l'anglais. II a appris, imagine!, cette satanee langue nasillarde, le 10 hongrois! J'ai Taccroche et comme un idiot, j'ai continue a marcher en riant et en faisant des pieds de ncz a mon petit Hongrois. 4 le filet de voüt: dünne Stimme, Stimmchen. apeure, e: verängstigt. 6 contenir: beherrschen, zügeln. 9 satane, e: verdammt 11 raccrocher: auflegen. 12 fahre des pkds de ntz: eine Nase drehen. Jean-Yves Soucy L'ile taboue Celui qui baptisa lac des Cédres cet élargissement de la riviére Sainte-Marguerite était certain ement soul ou bien ne connaissait rien aux arbres. Les thuyas ne croissent pas ä cette latitude oú ľorignal, ä la limite septentrionale de son aire de distribution côtoie le caribou. L'hydravion les avait deposes dans une baie sableuse, et pendant que les deux hommes installaient le campe-ment juste en retrait de la plage, Rachel se rendit ä ľextrémité de la pointe boisée qui leur cachait le côté 3 baptiser: taufen. ua elargissement: Ausbuchtung, Erweiterung. 4 soül, e: betrunken. 5 le thuya: Thuja, Lebensbaum. 6 la latitude: (geographische) Breite, Himmelsstrich, un orignal: nordamerikanischer Elch. 7 septentrional, e: nördlich, one aire: Gebiet. cotoyen zusammenkommen, in Verbindung kommen. 7f. le caribou: nordamerikanisches Rentier. 9 un hydration: Wasserflugzeug. la baie: Bucht. subleux, 66'. sandig. 10 f. le campemenh Lager. 11 cn retrait (m.) de: in einigem Abstand von/zu. 12 boise, e: bewaldet. 74 Jean-Yves Saucy L'ile taboue 75 nord du lac, une étendue d'eau de six kilometres de longueur cl d'en v iron deux kilometres de largeur. En aval de la pointe, une petite íle était ancrée au milieu du lac. 5 Du haut des airs, la femme a remarqué que le lac s'etire sur un plateau; la riviere Sainte-Marguerite s'y jette par une série de chutes, puis s'en écoule en un torrent tumult ueux fait de cascades et de rapides en escalier. Maíntenant qu'elle est au sol, Rachel a J'impression 10 que le lac occupe le centre d'un cirque car des monťa-gnes arrondies, de hautes collines plutdt, barrent lcs horizons. Elle prend quelques photographies, des vues d'ensem-ble, puis s'adosse au tronc ďune immense épinette 15 pour observer cet univers different de tout ce qu'elle a connu jusqu'ici. Et, tandis que ses yeux découvrcnt par-tout des signes de vie animate et que son oreille s'habi-tue ä la musique de ce pays, une grande paix s'installe en eile, Rachel croyait qu'elle étoufferait au milieu des 20 arbres, qu'elle se sentirait perdue dans cette nature du Nouveau-Québec, mais voiíá qu'elle éprouve un sentiment in fin i de sécurité et de plenitude. 1 une étendue: Fläche. 2 f. en «vafc flußabwärts. 7 la chute; Wasserfall. s'ecouiei? (ab)fließc-D. le torrent: Slurzbach. 7 f. rumultueux, se: stürmisch, tobend. 8 le rapide: Strömst hnclk-11 barren versperren. 1A s'adosser: sich anlehnen. une épinette: nordamerikanisehe Fichte, Kottanne. 22 la plenitude: Fülle. Professeur de photographic, c'est la perspective de su-jets nouveaux qui l'a incitée ä suivre Normand, son mari, et leur ami Bastieti ä cette partie de chasse. Bas-tien leur parlait de ce lac depuis des années, le dčeri- S vant comme un paradis. Lorsqu'ils prenaient le digestif apres un repas bien arrosč, Bastien se mettait a Téver en évoquant le voyage en canot sur [a Sainte-Margue-rite: ä huit ans, il avait accompagné son grand-pére ma-ternel, un montagnais de Sepí-íles, pour qui ii s'agissait in d'un veritable pelerinage, Avec les annóes, ce souvenir avait pris les proportions d'un mythe. En poussant un croassement rauque, un corbeau se pose dans une branche faitiere de l'arbre contre lequel s'appuie Rachel, ct il observe la femme avec Tassu- i5 ranee de quelqu'un qui estime étre chez lui. 11 change de branche pour l'examiner de plus pres alors qu'elle change sa lentille pour une téiéphoto, et eile a le temps de croquer une dizaine d'images avant qu'il ne re- 2 inciter: anregen, veranlassen, verführen. 5 le digestif; Verdauungsschnaps. 6 iiiTtii.fr: begießen, 7 évoquer: in Erinnerung rufen, le canot: Kahn, Boot. 9 le montagnais: Indianer Quebecs vom Volk der Algonkin. Sept-Ikä: Stadt in Quebec, ain Nordufer des Sankt-Lorenz-Stromes, fasl am Golf gelegen, ca. 630 km östlich von Quebec und knapp 900 km östlich von Montreal. 10 le pelerinage: Pilgerfahrt, 12 le croassement: Krächzen, rauque; rauh, heiser. le corbcau: Rabe. 13 fafriěre: zu einem Baumwipfel gehörend. 17 In lentille: Linse, Objektiv. 18 croquen hier: knipsen. 76 Jean-Yves Saucy L'tle taboue 77 prenne Fair vers le fond de la baie. Pendant qu'elle re-gagne le campement, te croassement regulier diminue d'intensite en s'eloignant. Uoiseau noir patrouille le ri-vage du lac, 5 Deux grandcs tentes soni montees: une pour le couple, et I'autre, qui fera office de cuisine et servira ä Bastien. Normand acheve d'y preparer le repas du midi, d'apres-midj, plutöt, car il est quinze heures. Bastien qui etait debout sur la plage ä regarder le lac dans la di- io rection de rile, vient dresser la table, Rachel ne se sent pas coupable de ne pas leur preter main forte: il a 6t6 convenu qu'elle ne les accompagnerait pas dans leur poursuite du gibier et qu'elle ne cuisinerait pas non plus. 15 - Et puis, qu'est-ce que t'en penses? de man de Normand ä sa femme en s'attablant. - Un endroit merveilleux. - Ha! Ha! Cest le mot qui convient, s'esclaffe le man. Bastien me disait tanlöt que c'etail un endroit magique 20 pour les Indiens: le lac et toute la valtee. Iis ne venaient jamais chasser par ici. Et puis l'ile que tu vois lä £tait taboue. C'est pour ca que Bastien hesitait ä nous emmener ici. - C'esl vrai? demande Rachel ä Bastien, 25 - Mais non! proteste Bastien d'un ton un peu bour-ru. 6 faire ofTice: dienen. 11 preter main forte: helfen, behilflich sein. 13 le gibier: Wild, 16 s'aUablen sich an den Tisch setzen, lä s'escfarfen schallend, laut auflachen. 25 f. bonrru, « unwirsch, bärbeißig. Normand s'amnse de voir son ami maussade pour une vétille et le taquine: - Le club de chasse přivé du grand manitou, c'est comme ca que vous appeliez Tendroit? s Uinterpellé hausse les épaules. Normand ne plaisante plus: - Ecoute, mon vieux, fais pas cette téte-lá. Tu ne vas pas me dire que tu prends cette histoire au sérieux, toi qui as čtudic la geologie á Yuniversitě? Et si moi je te m disais que je crois aux fées et aux tutins? Bastien hoche la téte en faisant une rnoue et se remet a manger. - Mais ton grand-pere, il y venait ici, lui? Cétait un in-croyant? 15 - II ne chassait pas. II venait faire des offrandes. - Comme dans un sanctuaire? demande Ráchel. Ca nťintéresse, cette histoire. - Vas-y Bastien, raconte-nous, dit Normand ďune voix amicale. 2fi - Cest vrai que les anciens ne chassaienl pas dans les parages du lac. La chutě en amont s'appelait quelque chose comme «Ia chutě aux offrandes». On y jetait des choses et le couránt était cense les porter directement 1 maussade: mürrisch, übellaunig, verdrossen. 2 la vetille: Bagatelle, Lappalie, taquiner: necken, hänseln. 5 un interpelle; Angesprochener 10 le In (in: Kobold, Gnom. 11 faire un« moue (fam,): ein Gesteht, einen Flunsch ziehen. 15 une offrande: Opfergäbe. 21 les pnragts (m.): Umgebung, Gegend, en araont: flußaufwärts. 23 ehre ceuse fuire qc etwas ihm sollen, vermutlich etwas tun. 78 J tan-Yves Soucy L'tle tabüue 79 aux esprits qui habitaient Tile. Cest fort possible: en regardant la carte topographique, j'ai vu qu'il y a un es-ker qui longe la riviere et une partie du lac avanl de plonger sous l'eau. £a pourrait faire devier le courant 5 en direction de Tile. - Un esker? demande Rachel. - Oui, une ancienne moraine de glacier qui forme une tres tongue colline de seutement quelques dizaines de pieds de hauteur, et d'a peu pres la meme largeur. 10 Comme un bourrelet Tl y a dejä eu un glacier ici; on en voit des traces partout. Sur file, il y a un btoc erra-tique. Rachel a pris les jumelles et examine Itle qui paratt n'avoir qu'une centaine de verges de diamfctre. 15 — Cette grosse roche au centre? - Oui, fait Bastien en se levant. - Eile brille, dit la femme. - Un esprit! raille Normand. - Sans doute un bloc qui contient de la pyrite de fer, on 20 les paillettes de micas dim grauit, repond 1'horn me d'unc voix trahissant un peu d'exasperation. De toute évidence, Bastien n'aime pas disculer de ce sujet et tf quitte la table pour se diriger verš sa teňte. - Tu. vois, lui crie Normand triomphant, il y a des expli-cations ä tout, et c'est toi-méme qui les trouves. a Bastien se contente de hausser les épaules. Apres le repas, les hommes partent en exploration. Iis vont longer les rives et aecoster aux endroits promet-teurs pour examiner les pistes afin de reperer les lieux de IraveTscc des caribous el les coins oü les orignaux in viennent brouter les plantes aquatiques. Rachel les regarde un moment s'eloigner, puis eile prend !a direction opposee, la camera autour du cou et le sac d'aecessoires ä l'epaule. Coupant ä travers la pointe, eile se retrouve dans une autre baie, plus petite; h une sente longe le rivage, et Rachel la suit vers le fond de l'anse, s'arretant souvent pour photograph!er, tantöt unc troupe de becs-scie, tantöt un rat musque\ un e"cu-reuil ou deux loutres qui se poursuivent sur la plage. II y a des betes partout, dont aueune n'est farouche. On 2 f. na esker Moräne. 10 1 la frsiere: Rand. U les fourres (m.): Gestrüpp, Dickicht, 17 ribailrc; erlegen, zur Strecke bringen. 22 la reserve fauniuue: Tierreservat. 24 une aube Morgendämmerung. 82 Jean-Yves Soucy Vile laboue S3 a Hume un feu sur la plage et rcste dehors ä 6couter les mille bruits de la terre qui ne dort jamais. Des plon-geons nagenl au large en modulant leur chant qui res-serable ä une plainte humaine. 5 La lune se leve, presque ronde, ä deux jours de sa plenitude. Rachel songe que sa menstruation prendra alors fin, II en est toujours ainsi: une coincidence tellement parfaite de leurs cycles, qu'avant d'etre mariee, eile fai-sait I'amour avec Norm and en se fiant aux phases de la to lune. C'etait avant d'apprendre qu'elle est sterile. II fait encore nuit quand les chasseurs se postent ä Taf-füt pres de la de charge du lac, ou les cervides Ira-versent d1 habitude. Si cela ne donne rien, ils feront la chassc fine ä Torignal dans ies marais ä l'ouest ou en- 15 core traqueront les caribous dans les collines. Rachel fait la grasse matinee jusqu'ä midi, et apres un copteux petit dejeuner, prend lc sentier qui suit le ri-vage. En route vers le nord> eile passe tout droit devant le mare'cage, curieuse de voir ä quoi ressemble un es- 20 ken Elle se sent chez eile dans cette nature qu'on dil 2 f. le plongeon: Seetaucherv 4 la platnte: Klage. 11 f, un affqt: Lauer. 12 la dechaige: hier: Oberlauf, Auslauf, les ccrvldes (m.): Hirsehe. 14 le marais: Sumpf. 15 traqucn aufspüren, verfolgen, jagen. 16 fuire Eft grase mal inet: bis in den Tag hinein, bis in die Puppen schlafen. 17 copieux,se: reichlich. äpre et sauvage, et tout occupee ä photographier des bet es, eile trouve 1'accident geographique sans Tavoir cherch6: le sentier grimpe soudain une pente abrupte, et serpente ensuite sur la crere d'une tres longue col- 5 line, Tester dont parlait Bastien. D'un cöte, Rachel domine le lac, de l'autre, une savane qui s'e" tale jusqu'aux pentes rouges et jaunes des feuil-les de saules et de bouleaux arctiques. Au ronron loin-lain de la chute, se melenl tout ä coup les cacanne- ii) ments d'une troupe d'outardes posees sur une langue de sable. La femme descend jusqu'ä la gr&ve pour ies photograph!er et les observer. Au bout d'une dizaine de minutes, un bruit compose d'une multitude de di-quetis attire son attention. Elle retourne se cacher sur 15 le talus, juste en contrebas du sentier oü passe une bände de caribous ä la queue leu leu. Ce sont leurs sabots qui sonnaillent Pendant ce temps, ä quelques kilometres au sud, les chasseurs ragent: un corbeau les suit ou les precede de- ! upre: herb, streng. 4 aerpenter sich schlängeln, la crete: Kamm, 8 le sanle: Weide(nbaum), le boulcau: Birke. 9 t le cacannement Schnattern. 10 une outarde; Trappe. 11 la piTve: Strand, Uferstreifen. 13 f, le cliquetl» {Girren, Klappern. 15 le ialiis: Böschung, 1 16 ä la queue leu leu: im Gänsemarsch. 161. le sabol: Hui. 17 soiinailler: klingen. 84 Jean-Yves Soucy Utle taboue 85 puis leur depart, se juchant au sammet des épinettes et annoncant leur presence par ses cris. Ce matin, il a fait déguerpir une harde qui descendait vers le lac. Et plus tard, dans le marécage, ils n'ont vu aucun animal, sauf parfois un oiseau qui fuyait. Aprés le lunch, ils grimpent dans les colli nes mais sans plus de chance: le cor beau ne les láche pas. Exasperé, Normand le descend d1un coup de 308 alors qu'il est perché au sommet d?un chicot Des que s'eteint Técho du coup de feu, le silence s1 installs Un silence absolu que les chasseurs attribuent au fait que les bétes d'iri n'ont peul-etre jamais été chas-sées et qu'elles out peur de oe bruit inconnu. La femme a entendu le coup de feu et son cceur s'est serré; les caribous ont relevé la téte, puis sont partis j u galop. Le bruit de leur course s'estompe et ensuite la femme remarque ce silence terrible, Méme le vent s'est tu dans les branches des arbres et seul le grondement de la chute meuble Tespace; peu k peu il se modifie, s'acccntue á intervalles régulters, devient comme le sourd battement ďun cceur affolé et bientót Rachel croit entendre un tambour. Ce bruit la rassure car il lui tieni compagnie dans un monde subitement desert et muct. Lorsqu'elle est de retour au campement oů la chute en aniont et les rapides en aval sont inaudibles, la femme 5 en tend to uj ours le tam-tam. Les chasseurs reviennent bredouilles á la nuit tombée et Rachel se rend compte qu'elle seule percoit le hattement, car Normand parle «d'un silement» et Bastien, «d'un tintement» qu'ils identifient comme ie bruit de fond du systéme auditif, in celui qu'on entendrait dans le vide de 1'espace. Malgré ses efforts, Normand n'arrive pas k animer la soiree: Rachel est triste et renfermée, tandis que Bastien est inconfortable, inquiet presque. «Tout ga n'est pas normals dit-il. Normand se moque d'eux en préterit dani qu'ils auraient dú rester en ville si le bruit de la circulation leur manque a ce point, cependant, c'esl lui qui allume la radio. La météo annonce du beau temps pour les jours prochains. Le matin suivant, un silence étourdissant recouvre tou-jours ie monde, sauf pour la femme dont le cceur bat dans les oreiiles. Ils sont tous les trois mal á raise, et 1 se juchcn sieb setzen. 3 rieguerpin sich davonmachen, abhauen, türmen, la harde: Rudel. Herde. 7 (Lese tu (Ire: hier: abknallen, abschießen, 8 etre perchc: sitzen. y le chicot: Stummel, Stumpf. 11 aüribuer zuschreiben, 16 s'estompen verklingen, nachlassen. 21 sonni, e: dumpf, taub. aPfule, e: kopflos, verängstigt, erschreckt. i 'il 1 dt-sert, c: verlassen, öde, leer: 4 inuudible: unhörbar. 5 f. revenir bredouill« ohne Jagdbeute, mit leeren Häiiden zurückkommen, ü le sitenient (que"b.): Pfeifen, le lintemtDt: Bimmeln, Klingen. 9 le Ii ruh de fohd: Hintergrundgeräusch. 12 renfcrmc, e: verschlossen. 19 etoundlssanf, c: überwältigend. 21 mal h l'uäse: unbehaglich, unwohl. 86 Jean-Yves $&ucy L'fte taboue 87 ne tenant plus en place» les hommes décident de traverser le lac pour aller chasser sur la rive est oíi il y a lä de belles montagnes et des passes prometteuses. Děs qu'elle est seule, Rachel prend le sentier et se dirige vers la charge du lac. Elle croise partout des bétes muettes qui s'arretent pour la regarder passer, et eile a Pimpression qu'on la tolere ä peine, que l'harmonie a été rompue. La chute est impressionnante et le socle rocheux vibre continuellement, Rachel fait quelques plans du lac, avec la silhouette de Tile au loin, puis descend s'asseoir au milieu des rochers épars au pied de la cataracte. La lemme doit changer de tampon hygiénique, et le fait sans se cacher: qui pourrait la voir ici? Cherchant comment se débarrasser du tampon souillé, eile se dit qu'il est sůrement biodegradable et eile le jette dans le cou-rant au pied de la chute, comme une offrande. Son sang retournera ä 1 a nature. Comme eile relěve la těte, eile voit un ours sur la rive opposée. Un ours enorme, monstrueux presque. Son premier reflexe en est un de peur, puis eile se rassure: la riviéře tumultueuse les séparé et si Tours décidait de traverser par le lac, eile aur ait ample ment le temps de fuir. Mais ces eraintes ne durent que quelques secondes 1 De pas tenir cn place: keine Ruhe haben, es nicht mehr aushalten. 3 In passe: Durchzug(sgebiet von Vögeln). 5 la charge: Zulauf. 9 le socle: Untergrund. 12 epars, e: verstreut, vereinzelt. la cataracte: Wasserfall. 16 biodegradable: biologisch abbaubar, 23 amplement (adv.): genügend, reichlich. car Tanimal la regarde fixemenl avec des yeux oü eile croit lire de la bonte et un peu de tristesse. Rassuree, eile le photographic II se dresse sur ses pattes arrieres comme pour paraitre ä son meilleur et la lumiere luit s sur le pelage qui laisse deviner des muscles puissants. Ouand eile a terming son film, Tours s'assoit et ils restent ä se conlempler durant un temps qui parait interminable. Finalement, la bete se leve et disparait prestement dans 111 la foret riveraine. La femme retourne au campement, rencontrant encore de nombreux animaux; il lui semble que leurs yeux expriment quelque chose de nouveau qu'elle n'arrive pas ä d^finir. Elle a le sentiment que quelque chose a change, mais ce n'est que devant la 15 tente qu'elle se rend compte que le tam-tam s'est tu et qu'en meme temps le monde a retrouve sa voix. Une volee de canards passe en criant; dans la savane voi-sine. un orignal lance son appel d'amour. Les oreilles de Rachel n'onl pas encore fini de s'habi- 20 tuer aux mille musiques revenues, qu'un coup de feu la fait sursauter. Trois autres suivcnl ä un rythme rappro-chc. Cela venait de Tautre rive. Les hommes ont tue. Et la joie qui se reinstatlail en eile se dissipe. Quand ils reviennent, les chasseurs jubilent: ils ont tue 25 un ours d'une taille prodigieuse dont ils remorquent 5 le pelage: Fell. 9 prestement (adv.): behend, gewandt. 10 riverain, e: umgebend, umliegend. 16 f. la volee: Schwärm. 21 sursauten zusammenfahren, -schrecken, -zucken, 23 se dissiper: sich auflösen, verfliegen, sich verflüchtigen. 25 prodigieux, se: außergewöhnlich, erstaunlich, remorquer: (abschleppen. 88 Jeun-Yves Soucy la depouille derriere ie canot. Rachel les regarde avec incredulite. II a suffi d'un petit mouvement de 1'index sur unc gachette de mdkal pour enlever la vie ä une bete aussi merveilleuse. Une bete qu'elle connaissait! s La femme s'en va pleurer dans la tente, tandis que les hommes hissent Tours sur le rivage ä l'aide d'un palan pour le suspendre au gros arbre sur la pointe. Iis ne le videronl et ne Tecorcheront que demain. Iis demandent ä Rachel de les photographier ä cöte de io leur prise et pendant qu'elle les detaille ä travers les lentilles, risibles bipedes en regard de cette grande masse noire £ carte lee, eile se prend ä les det ester. L'id^e lui vient que sa camera est une arme et eile presse sur le declencheur avec rage, 15 Durant le soupen les hommes sont exube>ants. Iis ont capture" un irophee, et iis ont vu les traces d'un orignal qui doit Stre lui aussi une piece de choix. Et en plus, le monde est redevenu normal. Iis bei vent pour feter la r£ussite de cette chasse qui trest pourtant encore qu'ä 2o son d£but. Rachel reste en dehors des festivity, taci-turne et boudeuse; les hommes s'etonnent d'abord de 1 la depouille: abgezogenes FeJJ, sterbliche Hülle. 3 la gpehette: Abzug. 6 le palan: Flaschetizug. 8 scorcher: das Fell abziehen, enthäuten. 10 la prise: Fang, Beute. dctaillL-r: eingehend mustern. 11 le bipede: Zweibeiner, -füßler. 14 le declencheur: Auslöser. 15 cxnbcrsnl, c: überschwenglich. 16 c&pltirer: rangen, erbeuten. 20 f, lad turne: schweigsam. 21 boudeur, se: schmollend. L'tle taboue 89 son attitude, puis n'y portent plus attention, trop occu-pés ä se remémorer pour la dixiěme fois la chasse de 1'aprěs-midi. Děs la tombée de 1a nuit, le ciel se couvre. Le mari vitu- s pere te météorologue qui a annoncé du beau temps alors que le tonnerre gronde dans le loinLain. Un peu ivrcs, les hommes vont se coucheT. La femme reste dehors: U ne pleut pas, et surtout, elie n'a aucune envie de s'etendre ä cóté de cetui qu'elle considére presque 10 comme un meurtrier. L'orage se rapproche mais les eclairs ne sont que de fai-bles lucurs ä třes haute altitude. Rachel songe un instant ä fixer l'orage sur ía pelíicule^ mais aller chercher sa camera lui de man derail trop d'efforts; eile reste i? prostrée, recroquevillée sur elle-mĚme, en proie á une tristesse infinie. Elle ne trouve méme pas curieux que les eclairs, qui augmentent rapidement ďintensité, semblent partir de 1'íle pour montér vers le ciel, Un eclair fulgurant frappe tout pres. Le bruit est 20 assourdissant: un cfaquement sec qui se prolonge en un interminable grondement. La fo udře s'est abattue sur la pointe, enflammant 1'épinette ä laquclle est sus-pendue la carcasse de 1'ours. Le grand arbre devient 4f. viruperen tadeln. 6 grander? grollen. le loiittuid: Feme. 15 prostře, ei erschöpfI, kraftlos. rccroquevillé, e: zusammengekrümmt, zusammengekauert. étre en proie: gequält, heimgesucht, gepeinigt werden. 19 fulgurant, e: gleißend, grell. 20 assoordissant, e; ohrenbetäubend, le clauucmcnt: Knallen. 23 la careaase: Gerippe. 90 Jean-Yves Svitcy L'fk taboue 91 une torche qui flambe en crepitant, Rachel craint un moment que toute la foret y passe, mais bizarrement le feu ne se communique pas aux arbres voisins. Les eclairs cessent et le toonerre se tait; forage ne s'est pas 5 en all e ailleurs, il s'est eteint. La nuit use la colonne ardente qui n'est bient6t plus qu'un mince fQt rougealre. A nouvcau le bruit du tamtam resonne dans roreille de Rachel. Les nuages s'en-trouvenl et la hine eel aire tout a coup le monde. L'ile 10 d'abord. La femme a le sentiment d'avoir assiste a une ceremonie plus qufa un phenomene; elle n'en cherche pas 1'explication mais le sens. Les hommes auraient dQ se reveiller lorsque 1'impact de la foudre a fait trembler le sol; 1'alcool n'est pas un si puissant somnifere! Cesi 15 comme si on n'avait voulu qu'elle comme temoin. Elle reste a contempler ia silhouette de Tile qui se decoupe sur le lac argente de lune malgre la fraicheur de la nuit qui la transit. Lorsque les hommes se levent, le violel de Torient an-20 nonce I'aube prochaine. lis s'etonnent de voir Rachel debout, sans se douter qu'elle a veille toule la nuit sur la plage, mais l'etonnement fait vite place a la slupeur quand ils apergoivent le chicot noirct sur la pointe. De rincredulit6 aussi. Ils s'y precipitent: leur ours est perdu! II n'en subsiste plus qu'un tas de cendre. Bastien rev lent inquiet et meme s'ii n'ose le dire, on devine qu'il n'est pas loin de voir la quelque chose de surnatu-■5 rel. Norm and le raisonne: cet arbre etait le plus haul et a lout naturellement attire la foudre. Bastien se range du c6te de la raison et de la logique, meme s il s'ex-plique mal que personne ne se soit rendu compte de rien. to Rachel feint la surprise; elle ne leur parle pas des eclairs qui partaient de Hie, pas plus que du tam-tam qu'elle en tend encore, Et en les ecoutant se desoler de la perte de leur trophee, elle dissimule le fait qu'elle en est rejouie. Les chasseurs retrouvent peu & peu leur as- ls surance et se promettent de se reprendre avec I'orignal. Et puis, ils trouveront peut-etre un autre ours tout aussi magnifique. Les chasseurs partent en canot apres le dejeuner et Rachel s'etend sur la plage, fascinee par Tile. Malgre' la fa-20 tigue, elle n'arrive pas a dormir, attendant elle ne sail quo!, un signe peut-etre. Elle sent qu'elle doit guetter. Le soleil la rechauffe, et juste comme la somnolence I'engourdk, elle discerne un mouvement sur le lac: un J La lorche: Fackel. crepiten knistern, jirasseln. 7 le fit; Baumstamm. 8f, s'entrourrin aufreißen. 13 nn iitipart; Einschlag. 14 le somntfere: Schlafmittel. 16 se decouper? sich abzeichnen, sich abheben, Iii irüEisir: erstarren lassen. 22 la slupeiir: Bestürzung, Verdutztheit. 1 une incredulite: Ungläubigkeit. 2 snbsisten übrig sein. 5 raisonner qn: jdm. gut zureden, jdn. zur Vernunft bringen. 10 feindre: vortäuschen 12 se desoler: traurig, betrübt sein. 141 une assurance: Sicherheit. 15 se reprendre: einen neuen Versuch machen. 21 guetter: wachen, aufpassen. 22 la somnoleuce: Schläfrigkeit, Halbschlaf, Dämmerzustand; 23 engonrdta erstarren lassen, gefühllos, steif werden lassen. 92 Jean-Yves Soucy L'fle taboue 93 grand oiseau s'eleve en tournoyant au-dessus de la pierre, prend de l'altitude et plane sur ses ailes eten-dues. II vient vers Rachel qui reconnaTt un aigle dore, L'oiseau approche, plongc et la femme apeuree relient 5 un cri, Les grandes serres jaunes sont ouvertes; paraly-see, Rachel enfonce la fete et protege son visage avec ses mains en attendant 1'attaque. Alors qu'il n'est plus qu'a dix pieds, le rapace pousse un cri, bat lourdement des ailes, tourne el va se poser to au pied de Tarbre foudroye. La femme releve la t£te: I'aigle la regarde, glatit a trots reprises et attend. Elle se leve et, comme en reve, s'approche. L'oiseau est juche* sur les cendres grises et noires de Tours et la fixe de son regard inhumain. Elle a froid et frissonne. Comme elle 15 s'est arretee a vingt pas, l'oiseau crie. Elle avance encore de dix pas; s'immobilise. Un autre cri, moins imp6ratif, presque doux, la fait se rapprocher encore, Elle n'est plus qu'a trois pas, deux; elle n'aurait qu'a etendre la main pour le toucher. Les yeux aux pu- 20 pilles dilatees regardent droit en e!le et Rachel com-prend qu'il faut payer pour la mort de Tours; elle ac-cepte le sacrifice. Comme il n'y a pas de haine dans les yeux du rapace, elle se dit que ce sera bref et qu'elle ne souffrira pas. 1 tournoyen Kreise ziehe a. 2 planer: schweben. 4 apeure, e: verängstigt. 5 la serre: Fang. 8 k rapace: Raubvogel. 11 glatlr: schreien (Adler), a trois reprises (1): dreimal nacheinander. 20 dilate, e: geweitet, 22 tc sacrifice: Opfer. L'oiseau etend ses ailes, les agite, et un nuage de cendre enveloppe la femme. Prise dans un tourbillon gris^ elle suffoque, ferme les yeux, tombe et reste pros-tree. L'aigle prend Tair en poussant des cris rauques, $ Rachel se raidit, mais Taltaquc ne vient pas. Le bout des remiges Teffleure au passage et lorsqu'elle rouvre ses yeux pic ins de larmes, Toiseau a dejä de passe le sommet des arbres et se dirige vers Tile au-dessus de la-quelle il tournoie trots fois avant de fondre vers le ro- lo eher. II doit s'etre pose car il a disparu. Elle se releve> grise de la t£te aux pieds. Le sol est net au pied de Tarbre calcine: la cendre qui ne s'est pas de-pose'e sur la femme s'est repandue sur Teau ou elle forme un film que le courant 6tire vers le large. Rachel 15 retourne au campenient et essaie de comprendre ce que vouiait lui dire Toiseau. Et cette cendre? Elle hesite ä Tepousseter. Apres tout, e'etait hier la chair vivante de Tours, L'aigle lance encore un cri bref et imperatif. Obeissant ä une impul-20 sionT Rachel descend dans le lac, insensible ä la mor-sure de Teau glaciale qui lui vient a Ea taille. Elle asperge son visage: la cendre delayee ruisselle et pene- 2 le ton rh ill tin: Staubwirbel. 3 suffoquer: ersticken. 6 la renuge: Schwungfeder. effteurer: leicht berühren. 9 fondre: sich stürzen, 12 calcine, c: verkohlt. 17 epousseterr abstauben, (Staub} abstreifen. 20 f. la morsnre: beißende Kälte, 22 asperger: benetzen, besprengen. delayer: verwässern, verdünnen. ruisseller: rieseln, rinnen, tröpfeln. 94 Jean-Yves Soucy L'lfe tabous 95 10 tre dans sa bouche quand elle respire. S'assoyant sur le fond, elle sMmmerge completement durant quelques seconder Quand elle ressort, il n'y a pins de cendre sur elle, settlement un gout acre dans sa bouche. Elle retire ses vereinen ts et fait un grand feu pour se secher et se ri-chauffer. Ensuite, elle reste tout le jour ä contempler t'Tle ou Taigle crie ä intervailes reguliers. Le rythme du tam-tam s'accelere, devient plus pressant, et peu ä peu Rachel devine ce qu'on attend d'elle. Les chasseurs reviennent bredouilles ä la fin du jour; ils n'ont vu aucun animal, pas mSrne un ecureuil ou un oiseau, Bastien est de venu tacit urne. Tout qa. n'est pas normal, selon lui. Dejä cette histoirc de Tours ... Et 15 puis, ce silence ... Normand a beau jouer les rationa-listes et taquiner son compagnon, äl n'arrive pas ä dis-simuler son inquietude, Rachel qui les attendait est tout excitee: eile affirme avoir vu quelqu'un sur l'ile. Les chasseurs ne la croient 20 pas, disant qu'avec la distance ses yeux l'auront trom-pee. Elle s'obstine, car c'est ä travers le teleobjectif de sa camera qu'elle a vu le vieillard. Mfime qu'elle l'a Photographie! Elle insiste pour qu'ils aillent voir, et lorsque les deux hommes se montrent re'ticents, elle se 25 moque d'eux et les menace de rapporter leur couillar- 2 s'immerger ein-, untertauchen. 16 f. dbsimulcn verbergen, verheimlichen. 21 s^lwliner: bestehen, beharren. 24 reticent, e: reserviert, zögernd. 25f. Ja cnuillardise: Feigheit, dise a leurs amis, Et sans plus attendre, elle se dirige vers le canot. Craignanl d'etre ridicules, ils s'embar-quent avec elle. Masti en prend place á la poupe, Normand á la proue; * Rachel s'assoit au centre, les deux carabines a cóté d'elle. - [J reste encore une demi-heure de clarté, remarque Normand alors que le canol approche de Hie. J Is en font le tour, a cent metres du rivage, en appelant, jit - £a ne répond pas, naturel lement. E n'y a personne, dil Bastien. - II est peut-étre sourd ou blessé, rč tor que Rachel f il avait l'air vieux. Accostons, je vais descendre et aller voir. n La pince du canot atterrit sur I'etroite bande de sable. Piques dans leur orgueil, les hommes disent á Rachel trattendre au canot. lis partent chacun de leur cótč avec leur carabine pour explorer 1'ile. C'est pres de I'unorme bloc de pierre qu'ils se retrouvent sans avoir hi vu une trace de pas ou quoi que ce soit d'anormal. - II n'y a que des buissons! Rien de bien sorcier dans (on ile taboue, se moque Normand maintenant ras-HUré. flastien ne répond pas car son attention est attirée par jm un petit objet blanc au pied du rocber. Un morce a u de A lu poupe: Heck. Iii proue: Bug, Spitze, i 5 la pince: Spitze. ?A le buisson: Busch, Gebüsch. ricn de bien forcier (lom.); kein Kunststück. % Jean-Yves Souey L'lle taboue 97 ouate ou de rissu d'un blanc immacule; un bout de ficelle en d6passe. - On dirait un tampon hygienique, fait Bastien avec surprise. 5 - Comme ce qu'utilise Rachel, rajoute Normand. «Rachcl!» lis poussent ce cri en m6me temps et sans se consulter, se precipitent vers le rivage. Le canot est au large, a mi-chemin deja de la rive. lis appeilcnt en vain. Elle leur tournc le dos et pagaie avec vigueur. 10 - Qu'est-ce qui lui prend? -Tire en Fair, ou a cote. Elle entend peut-etre pas. Comme Normand arme sa carabine, il s'apercoit qu'il n'a plus son chargeur. - Je dois Tavoir perdu. Tire, Bastien. 15 Lui aussi n'a plus de chargeur. lis ne comprennent pas. «Qu'est-ce qui lui prend?» demandc encore Nop mand abasourdi. Ni Tun ni I'autre ne saurait nager jusqu'au bord, et de toute facpn l'eau est d'un froid mortel. 2n Un formidably bruit de pas se fait entendre derriere eux; quelqu'un ou quelque chose approchc a travers lei buissons. D'ur> coup, la terreur les submerge et ils se mettent a hurlei. «L'ile interdite», murmure le metis cn 1 Ii in ouate: Watte. iniinacule. e: unbefleckt, rein. 9 pagaien paddeln. 12 armen durchladen, spannen. 13 le chargeun Magazin. 17 abasonrdi, c: verblüfft, verdutzt. 22 submergen überwältigen, überkommen. 23 le metis: Mestize, Halbblut, tlcgainant son couteau. Tournant le dos au lac, il bran-dil son poignard vers les founds. Rachel jette les deux chargeurs dans le lac tandis que le bruit du tam-tam devient assourdissant et submerge les i hurlemcnts. Alors que le monde est secouc par une ru-meur plus puissante encore que celle de la foudre, une paix infinie descend sur Rachel. Lorsqu'elle atteint la plage devant les tentes, le tumulte s'est calme et le tambour est devenu plus melodieux. II fait bientot place in mix chants et aux appels des animaux et une lune pleine se leve sur un monde au calme coutumier. Rachel se dit que sa menstruation est terminee. Pöur la premiere fois depuis plusieurs jours, Rachel a hien dormi; le monde lui parait un paradis. et pas une It ftcule fois le souvenir de Normand el de Bastien ne vicnt la troubler. Alors qu'elle dejeunc, un troupeau il'unc trentaine de caribous debouche de la foret et passe ä quelques pieds d'elle sans manifester aucune ncrvosite. Bite voit tout ä coup un corbeau s'elever au-dessus tie Tile, venir vers elle et se percher dans une epinette doriiere les tentes. II crie sans arret. Un autre mouve-menl sur Tile. Cette fois, e'est un ours qui plonge dans k* lac et nage vers le rivage, guide par Tappel du cor- iii i «Ii uiiinei: (Waffe) ziehen. I I. Ii rändln (Waffe) schwingen,